mercredi 29 avril 2009
Vidéos : les juifs en Iran
Quel est le sort des juifs en Iran ? Après tous les remous autour des propos du président Ahmadinedjad, difficile de ne pas se poser la question. Un reportage produit par Journeyman Pictures, compagnie britannique de bonne réputation spécialisée en documentaires, propose une tentative de réponse. Je propose un texte français qui suit à peu près le commentaire.
La population de l'Iran (69 millions de personnes) est à 98% musulmane. Les 2% restants se partagent entre juifs, chrétiens, Bahai', zoroastristes. L'Iran est un bastion de la foi musulmane, à laquelle la société doit se soumettre. Mais dans les rues de Shiraz, on rencontre aussi les fidèles d'une autre religion, en tout semblables à leurs compatriotes, jusqu'au moment de la prière. Ce sont les juifs d'Iran. Un Perse ( = iranien), Cyrus le Grand, libéra leurs ancêtres esclaves à Babylone, leur permit de rentrer à Jérusalem (mais la Judée resta dépendante de l'Empire perse), et fut le premier souverain à codifier la liberté religieuse. La communauté juive d'Iran a gagné une place reconnue, mais en 1979, lors de la révolution islamique, la majorité des juifs fuirent le pays. Le député juif (rappel : la Constitution réserve aux juifs iraniens un siège au Parlement et leur reconnaît un statut de minorité religieuse) interviewé déclare que la plupart se sont rendus aux Etats-Unis. N'empêche que l'Iran compte, mis à part Israël, la plus large communauté juive du Proche-Orient. Les juifs ont été déclarés "Peuple du Livre" et leurs droits sont protégés par la Constitution. Des quelque 100.000 présents avant 1979, il reste environ un quart. Curieusement, depuis la révolution islamique, la population juive d'Iran est devenue de plus en plus pieuse. Si 10% seulement d'entre eux maîtrisent l'hébreu, les synagogues sont remplies - il y en a 22 à Téhéran.
Les juifs d'Iran préfèrent généralement garder un profil bas, mais pas tous. L'antiquaire Moses Baba montre fièrement les portraits de ses ancêtres et propose une vodka : l'interdiction de l'alcool est pour les musulmans, dit-il, pas pour les juifs. N'empêche qu'il cache ses bouteilles, de peur des "milices barbues" (bouteilles si bien cachées qu'il a peine à les retrouver). Mais malgré son sourire, il se plaint : les touristes ont disparu, les affaires sont au point mort. Ses enfants sont partis aux Etats-Unis et en Israël. "Ils m'ont dit de venir les rejoindre, mais je suis bien ici. Les vieux comme moi ne vont pas vivre là bas".
Mais le mouvement de population ne se fait pas que dans un sens. Robert, un agent immobilier de Los Angeles, est revenu - temporairement, le temps de chercher une épouse -. Qu'est-ce qu'il reproche aux femmes de L.A. ? Les femmes qui sont parties après la révolution de 79 ne sont plus iraniennes, Robert n'est pas le seul juif qui vient se chercher une épouse marquée au coin de la culture iranienne. Les femmes désireuses d'aller vivre aux States ne manquent pas - mais Robert a l'âge de leur père, c'est un prix qu'elles trouvent trop élevé -. L'idée de l'épouser déclenche des rires. L'homme sait ce qu'il veut, une femme d'environ 27 ans (il en a 44). La jeune femme interviewée explique que les hommes comme Robert viennent chercher des épouses de la moitié de leur âge, qu'ils ne trouvent pas aux USA.
Mais, déclare le reporter, la vie n'est pas tout à fait aussi rose pour les juifs que les officiels iraniens ou les dirigeants juifs le laissent entendre. Ils sont parfois persécutés par des éléments extrémistes. En 1999, treize juifs de Shiraz furent arrêtés et accusés d'espionnage au profit d'Israël - la crise la plus grave que la communauté ait connue -. Leur emprisonnement provoqua de vives protestations de gouvernements occidentaux. Ils étaient otages dans la lutte d'influence entre éléments islamistes durs et réformateurs. Finalement, tous furent relâchés. Le futur des juifs est peut-être flou, mais ils ne connaissent pas le sort des 300.000 fidèles Bahai', dont la foi née au 19ème siècle dérive de l'islam chiite. Ils sont considérés comme des hérétiques et durement persécutés en Iran. Le député juif Maurice Motammed rejoint les autorités dans la mesure où lui non plus ne considère pas le bahaisme comme une religion.
Un garçon vient de naître dans une famille juive. C'est la fête, on va procéder à sa circoncision. Derrière des portes closes, les femmes se débarassent du voile imposé à l'extérieur. L'une d'entre elles déclare : "Vous voyez, nous organisons des fêtes, hommes et femmes ensemble, et n'avons pas de problème". Soraya estime que la vie est meilleure que dans les années suivant 1979, mais que quand ce bébé grandira, il peut quand même s'attendre à des discriminations. Ici, on préfère avoir des musulmans aux postes de responsabilité plutôt que des gens qui viennent des minorités. Pour l'avenir, les avis divergent. Certains estiment qu'une moitié de la communauté juive s'en ira, mais d'autres n'y croient pas, n'imaginent pas qu'on puisse quitter ce pays pour une autre vie. On n'a pas beaucoup de problèmes ici, dit Soraya. Pour le reporter, la communauté juive va poursuivre sa relation très forte avec ce pays, une relation qui remonte à près de 3.000 ans.
Journeyman Pictures a désactivé l'intégration de ce reportage via Youtube et Dailymotion, mais vous pouvez le découvrir ici. Il figure aussi au bas de cet article.
Vous pouvez découvrir un autre reportage sur le même thème ici . Ci-dessous, un résumé du commentaire.
Les juifs peuvent pratiquer leur culte sans encombre, ils sont reconnus par la Constitution comme minorité religieuse, ils ont un représentant au Parlement (bénéficiant ainsi d'une exception, car leur nombre - +/- 25.000 - ne le leur permettrait normalement pas). Ce député a distribué le texte de sa protestation lorsque le président Ahmadinedjad a mis en cause la réalité de l'Holocauste. Le reportage se déroule entre autres dans un hôpital juif, dans lequel une partie du personnel et des patients sont musulmans. Ahmadinedjad a fait un don équivalent à 17.500 euros à cet hôpital. Le reportage se poursuit dans une librairie juive, comprenant des livres en hébreu et en farsi (la langue parlée en Iran). Néanmoins, un représentant de la communauté juive empêche l'équipe d'interviewer un jeune couple juif. "Si elle dit des choses fausses par erreur, cela va être imprimé, va faire le tour du monde, et nous aurons des problèmes". Le commentaire fait remarquer que la liberté de parole est limitée pour tous en Iran, mais que selon un rapport gouvernemental des Etats-Unis, les juifs iraniens hésitent à s'exprimer publiquement. Néanmoins, certains juifs soulignent qu'ils ont reçu l'assurance de pouvoir se rendre en Israël sans problème. L'un des dirigeants de la communauté juive a connu l'ayatollah Khomeiny, qui a plutôt amélioré le sort des juifs iraniens, en soulignant que le sionisme est une idéologie politique, pas une religion (idée qu'Ahmadinedjad a reprise), et que les juifs d'Iran devaient être respectés en tant que citoyens. Les juifs d'Iran se retrouvent dans une meilleure situation que les Bahai (ceux-ci affirment être 300.000. Le Procureur général d’Iran a déclaré en février que "Les organisations baha’ies sont illégales, leurs connexions avec Israël et leur inimitié vis-à-vis de l’Islam et le système islamique absolument certains, et le danger qu’ils représentent pour la sécurité national, un fait établi". Néanmoins, le député juif estime qu'il existe des discriminations contre ses coreligionnaires. Ainsi, ceux-ci accèdent difficilement à des fonctions dirigeantes dans l'armée ou l'administration. Quant à exprimer son soutien à Israël, il n'en est pas question. Mais enfin, dit un interviewé, "Ici personne ne me dit 'Tu es un juif et moi un musulman' Les deux religions sont très proches".
Mots-clef : Iran, juifs, Israël, reportage, vidéo
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