dimanche 13 novembre 2011

"Silence, On Vaccine". A Quand Un Vaccin Contre l'Intox ?


A PROPOS DU FILM « SILENCE ON VACCINE ».
17/10/2009 puis 13/11/2011
Illustration Wikipedia Commons

J’avais rédigé ce texte en 2009, pour une personne qui m’avait signalé ce film. Les mouvements anti-vaccin en font évidemment grand cas. Vu que ces mouvements sont toujours aussi actifs, et font toujours autant de dégâts, vu de nouvelles polémiques, je mets ce texte en ligne, avec quelques ajouts.

Comme tous les documents de ce type, ce film s’est répandu comme une traînée de poudre, puisqu’une recherche sur son titre dans Google ramène environ 581.000 résultats. Il mérite donc une petite analyse.



La première phrase du film :
« Depuis une vingtaine d’années, un phénomène inquiétant semble se développer dans les pays occidentaux ».
Semble ? « Sembler : avoir une certaine apparence. Paraître ». Il se développe, oui ou non ?
.« Des enfants de plus en plus nombreux déclarent de graves troubles neurologiques dans les jours qui suivent une vaccination classique. » De plus en plus nombreux ? Quel était le nombre ? A quelle date ? Quel est-il maintenant ? On ne nous le dira jamais.
« Dans les jours ? » Alors que dans l’exemple qui suit, on peut conclure à un délai de l’ordre d’un an à un an et demi ?

Première séquence : vaccin RRO (la rougeole, la rubéole et les oreillons).
La mère signale que le garçon filmé présente depuis toujours des problèmes (« il avait donc un peu de retard dans son développement », « il ne parvenait pas à explorer son univers comme les autres enfants », il présentait des problèmes de motricité).
Après avoir reçu le vaccin, il devient subitement différent (une année de hurlements, dit-elle). Pourtant les parents ne semblent pas avoir demandé un diagnostic à ce moment là, la mère ne mentionne aucune demande envers un médecin.
Quand il a eu 2 ans ½, on a reçu un diagnostic d’autisme, dit la mère. A quel âge avait-il reçu le vaccin ? Je vois qu’on le pratique entre 9 et 12 mois avec rappel à 18 mois, ou à 12 mois et avant de commencer l’école (entre 4 ans et 6 ans). La mère ne parle pas d’un rappel. Comment se fait-il que ce diagnostic soit établi un an à plus d’un an et demi après le vaccin ? Si les symptômes ou en tout cas des anomalies étaient apparus immédiatement après le vaccin comme ils l’affirment, pourquoi les parents ne se sont-ils pas précipités pour demander un diagnostic ? Avant le vaccin, les parents ont-ils entretenu le médecin traitant des problèmes dé développement que connaissait déjà leur enfant ? Si oui, qu’a-t-il dit concernant une vaccination ?
Où est la moindre preuve de liaison entre le vaccin et l’autisme ? Le diagnostic a suivi le vaccin – apparemment de loin, et a suivi combien d’autres événements ? – Quelles ont été les recherches sur un lien de cause à effet ? Quelles recherches sur les problèmes dont l’enfant souffrait déjà avant le vaccin ? Rien. La mère déclare qu’elle « sait ». Point barre.
Ce vaccin est ultra-répandu. Je ne trouve pas de chiffre concernant les USA, mais en Grande-Bretagne, avant la controverse, 94% des enfants l’avaient reçu. Au Canada, son application est quasi générale. Donc, si 9,5 enfants sur 10 sont vaccinés, évidemment que quand un enfant est reconnu autiste, il y a 9,5 chances sur 10 qu’il ait été vacciné, cela ne prouve aucun rapport entre vaccin et autisme, tant qu’on ne cite pas des chiffres précis et probants montrant qu’il y a un taux supérieur d’autisme chez les enfants vaccinés que chez les très rares enfants non vaccinés. Il n’y a rien de semblable dans ce film. Celui-ci passe discrètement sur une question : pourquoi cette augmentation des diagnostics d’autisme depuis une vingtaine d’années, alors que le vaccin RRO est immensément répandu depuis le milieu des années 70, soit non 20 mais plus ou moins 35 ans ? La réponse que je trouve dans des documents médicaux est simplement que les critères de diagnostic de l’autisme ont changé, et qu’on porte ce diagnostic aujourd’hui dans des cas où on ne le portait pas jadis.
« Il y a 20 ans, ces enfants recevaient un diagnostic de retard mental ou de trouble du langage, par exemple. De nombreuses études récentes effectuées dans la plupart des États américains ont conclu que l’augmentation de l’autisme est associée à une décroissance équivalente des diagnostics dans la catégorie du retard mental. » Selon le Dr Fombonne, des changements dans les critères diagnostiques et une meilleure sensibilisation expliquent en grande partie l’augmentation du nombre d’enfants autistes. »
http://www.passeportsante.net/fr/Actualites/Dossiers/ArticleComplementaire.aspx?doc=vaccination_mmr_thimerosal_do#P20_553

Je lis sur un forum cette remarque : « les enfants autistes le sont aussi depuis la naissance ! cela ne se remarque pas car on ne voit pas de troublement du comportement chez un bébé de 2mois ...il boit, il dort, ilpleure ...comme tout bébé.
le moment de la vie où l'on remarque un probleme comportemental est aux alentours de 15 mois...retard psychomoteur, retard du language......et cela correspond avec la dose de vaccin RRO ! alors les parents mettent cela sur le dos du vaccin..."il a fait son vaccin et depuis lors il n'évolue pas, il parle peu..." .
l'age du vaccin rro et l'age du début du diagnostic coincide malheureusement pour qu'il y ai des confusions idiotes ».
http://www.familles.com/v4/forums/forums-familiaux-la-sante-de-bebe-vaccin-rro-autisme-t238004.html .

Une étude, « …menée à Montréal auprès de 28 000 enfants par le Dr Fombonne, a montré qu'au moment où la vaccination RRO a décru au Québec, entre 1987 et 1998, la prévalence de l'autisme a quant à elle progressivement augmenté. (…)Inversement, au Japon, où la vaccination RRO a été interrompue au début des années 1990, le taux de vaccination RRO ayant chuté de 69,8 % en 1988 à 1,8 % en 1992, le nombre de cas d'autisme a continué d'augmenter, passant de 48 cas pour 10 000 enfants en 1988 à 117,2 pour 10 000 en 1996. »
http://www.ledevoir.com/2009/02/07/232179.html . Ceci démontre qu’il n’y a pas de lien entre vaccination et autisme. Pourquoi le film n’en parle-t-il pas ?

La pédiatre Julie A. Buckley qui intervient ensuite est tout aussi peu précise. « Quand on a des parents qui se plaignent et des scientifiques qui confirment que l’exposition au mercure cause des problèmes et que l’exposition à l’aluminium cause des problèmes, et que l’injection de trois virus actifs dans un système immunitaire endommagé cause des problèmes, pourquoi refuse-t-on de le régler, ce problème ? » . Combien de parents ? Quels scientifiques ? L’immense majorité des scientifiques dit le contraire.
« C’est ridicule de trouver autant d’enfants dans une même petite ville, tous avec la même histoire ». Combien ? La ville, Ponte Vedra, compte 35.000 habitants. Je vois 7 ou 8 enfants dans la piscine, mais rien ne nous dit combien sont autistes. On voit un gros plan sur deux qui semblent l’être. Aucun chiffre n’est mentionné. Pourquoi dit-elle « dans un système immunitaire endommagé » ? Sur l’augmentation du nombre de cas, voir plus haut.

Pour la mère et l’enfant suivants, idem qu’au début (j’ignore s’il est normal que l’on pratique 6 vaccinations le même jour).

La présidente du Centre National d’Information sur la Vaccination, Barbara Loe Fisher, demande ensuite : « Où est la preuve que la vaccination amène une meilleure santé publique ? ». C’est une phrase ahurissante. Cette dame s’indigne que l’on vaccine des nouveaux-nés contre l’hépatite B. L’hépatite B cause un à deux millions de décès par an. La vaccination du nouveau-né fournit une protection à 95%. De plus, un nouveau-né non vacciné risque de devenir un porteur du virus qui contaminera d’autres personnes.
(http://www.em-consulte.com/article/12170 , Gilbert Donders : MD, PhD
Els Caeyman : MD
Department of Obstetrics and Gynaecology, Gasthuisberg University Hospital, Herestraat 49, 3000 Leuven Belgique ).

Quels sont les risques encourus à cause de ce vaccin ?
« Les effets secondaires mineurs peuvent inclure :
• des rougeurs, de l’enflure ou de la douleur à
l’endroit de la piqûre;
• de la fatigue;
• une fièvre légère qui se traite avec de
l’acétaminophène (p. ex. Tylenol).
Les effets secondaires graves sont très rares, mais
pourraient inclure :
• des réactions allergiques;
• de fortes douleurs ou une enflure importante. »
( www.gov.mb.ca/health/publichealth/cdc/fs/hepbaby.fr.pdf )

Cela me paraît préférable à un décès, ou à provoquer le décès d’autrui. Cette dame pense le contraire. Elle s’indigne que l’on vaccine des enfants, alors que la petite enfance est la période la plus propice pour entraîner le corps à se défendre.

« Tous les vaccins suivants sont recommandés », dit-elle. Or, et on le lit partout, cela signifie qu’il est conseillé aux parents d’en parler avec le médecin qui suit l’enfant et de se décider en conséquence – mais le discours et la présentation dramatiques donneront à la plupart des spectateurs l’impression que ces vaccins sont obligatoires. Impression renforcée par la légende « Calendrier semblable en France et au Québec ».
J’aimerais savoir pourquoi, quand on parle du vaccin RRO, on ne mentionne jamais dans ce film qu’il sert à quelque chose, et pas un peu. La rougeole est une maladie très contagieuse et potentiellement grave. Une personne atteinte sur 300 en mourra. La rubéole, chez une femme enceinte, peut avoir des conséquences dramatiques sur le fœtus. Avant la vaccination, les oreillons étaient la cause la plus répandue de méningite virale et de stérilité. Lorsqu’une polémique a éclaté autour du vaccin RRO en Grande-Bretagne dans les années ’90, le pourcentage de vaccinations a baissé, et la rougeole est réapparue.


A propos de ce National Vaccination Information Center, c’est un groupe de parents, pas une organisation de médecins. Quant à leurs accusations, Wikipedia note « The issue has been examined by numerous scientific bodies, which have concluded that there is no evidence for the claimed link between vaccines and autism” (“la question a été examinee par de nombreux organisms scientifiques, qui ont conlu qu’il n’y a pas de prevue de ce pretend lien entre les vaccins et l’autisme).

Point suivant : la “gigantesque étude” menée par les chercheurs David et Mark Geier qui leur aurait permis d’établir « un lien clair entre la survenue de troubles neurologiques chez les enfants et la présence de mercure dans les vaccins sous la forme d’un conservateur nommé Thimérosal ». (25 microgrammes par dose de vaccin). L’un de ces chercheurs fait une déclaration ahurissante : il a pratiqué jadis des milliers d’injection d’un vaccin dont il ignorait qu’il contenait du Thimerosal et d’ailleurs il ne savait pas ce qu’est du Thimerosal ! Voilà un médecin qui injecte des milliers de fois un produit dont il ignore la composition ! Et qui ne sait pas ce qu’est un produit utilisé à l’époque dans la plupart des vaccins !

Questions :
- qu’est-ce qu’une « gigantesque » étude ? Qu’est-ce qu’un terme aussi vague nous apprend ? Quand et comment a-t-elle été menée ?
- Pourquoi le film ne nous dit-il pas que les conclusions des Geier Père et Fils ont été considérées par l’American Academy of Pediatrics comme comportant « de nombreux défauts conceptuels et scientifiques, des omissions de faits, des inexactitudes et des affirmations fausses » ? ("numerous conceptual and scientific flaws, omissions of fact, inaccuracies, and misstatements").
- Pourquoi ne nous dit-il pas que Mark Geier fait l’objet de plusieurs plaintes pour s’être présenté à plusieurs reprises comme expert neutre alors qu’il était conseiller d’un groupe militant contre la vaccination, et pour diverses autres atteintes à l’éthique médicale et scientifique ?
- Pourquoi ne nous dit-on pas que vu l’émotion provoquée chez les parents, de nombreuses autres études ont été menées sur un éventuel lien entre vaccination et autisme, et qu’aucune n’a jamais corroboré les résultats publiés par les Geier ?
- Pourquoi ne mentionne-t-on pas qu’après s’être rendu célèbres en affirmant que les vaccins provoquent l’autisme, et donc connus de tous les parents d’enfants autistes des Etats-Unis, les Geier ont breveté un médicament contre l’autisme, le Lupron ? Mark Geier l’a présenté comme « miracle drug ». Mais le laboratoire Abott Laboratories, qui avait d’abord participé à la commercialisation, a interrompu sa collaboration avec les Geier, expliquant ce choix par la non-existence de preuve scientifique à l’appui des thèses de ces chercheurs. Les Geier proposent une thérapie contre l’autisme qui coûte modestement 5.000 $ par mois. On trouve quelques précisions supplémentaires sur Wikipedia http://en.wikipedia.org/wiki/Mark_Geier .
- Pourquoi ne mentionne-t-on pas que l’Organisation Mondiale de la Santé a déclaré que les vaccins comprenant du thimerosal « sont utilisés en toute sécurité dans le monde entier depuis 60 ans et qu’ils ont contribué à sauver la vie de millions d’enfants ». L’OMS a continué à soutenir l’utilisation du Thimerosal, « irremplaçable pour éviter la contamination des vaccins après ouverture de flacons multidoses. »

- Pourquoi le film ne pose-t-il pas la question : « Pourquoi le Thimerosal aurait-il brusquement provoqué de l’autisme, alors qu’il est utilisé sans problème depuis 1929 ? »

- Pourquoi ne nous dit-on pas que les progrès, entre autres, dans la confection des vaccins monodose ont rendu dans beaucoup de cas inutile le conservateur Thimérosal (destiné aux vaccins multidoses), sur lequel le film tartine inlassablement ?

- Pourquoi ne nous dit-on pas que cette chute massive dans l’utilisation du Thimerosal n’a amené aucun changement dans les chiffres de l’autisme, ce qui me semble réduire à zéro toute l’argumentation développée dans le film ?

Une étude d’un Dr. Wakefield avait également voulu établir un lien semblable, mais en s’appuyant sur une autre hypothèse. Elle a été suivie de plusieurs études démentant ses résultats. « Des études ont été effectuées au Danemark, au Royaume-Uni, en Finlande, en Suède, aux États-Unis, au Japon et au Canada. Elles sont toutes arrivées à la même conclusion : il n’y a pas de lien causal entre le vaccin RRO et l’augmentation des cas d’autisme ».

http://www.passeportsante.net/fr/Actualites/Dossiers/ArticleComplementaire.aspx?doc=vaccination_mmr_thimerosal_do#P20_553

« De plus, l’hypothèse d’une persistance du virus de la rougeole chez les enfants autistes vaccinés a elle aussi été contredite par des études rigoureuses, explique le Dr Éric Fombonne, directeur du Département de psychiatrie à l'Hôpital de Montréal pour enfants. En 2004, 10 des coauteurs de l’étude menée par le Dr Wakefield ont publié une rétractation pour se dissocier de son interprétation des résultats », poursuit cet expert mondialement reconnu dans le domaine de l’autisme ».
« Le Dr Paul A. Offit est directeur du Département des maladies infectieuses à l’Hôpital pour enfants de Philadelphie. Selon lui, le débat autour de la vaccination et de l’autisme a permis à plusieurs personnes de s’enrichir, notamment celles qui proposent des traitements miraculeux, et souvent coûteux, aux parents désemparés devant cette maladie. Ce pédiatre a publié, en septembre 2008, Autism False Prophets – Bad Science, Risky Medicine and the Search for a Cure (Columbia University Press).
(…) Des médias aux avocats, en passant par les conflits d’intérêts de certains chercheurs, ce livre écorche bien des gens, notamment le Dr Wakefield. Une lecture presque obligée pour ceux qui s’intéressent à ce débat, quelles que soient leurs convictions. »

A propos de ce docteur Wakefield, l’une des stars du film, il a été jugé par le GMC (General Medical Counsil britannique) coupable de comportements malhonnêtes et irresponsables envers ses patients, notamment d’abus envers des enfants mentalement retardés. Le journal The Lancet a fait connaître ses regrets d'avoir publié une étude réalisée par ce médecin, parce qu'elle s'est avérée frauduleuse. De plus, il y avait conflit d'intérêt : Wakefield avait rédigé cet article alors qu'il se faisait payer pour témoigner dans un procès contre un fabricant de vaccins. Payer grassement : 435.643 £ ! Le business de l'anti-vaccin est une réalité. Voir http://briandeer.com/wakefield/legal-aid.htm ,
http://briandeer.com/wakefield/legal-experts.htm
http://briandeer.com/wakefield/dawbarns-news.htmet http://www.servicevie.com/sante/fievre-et-maladies-infectieuses/le-vaccin-rro-cause-l-autisme/a/176/2. Wakefield a intenté des actions en justice contre les journalistes qui avaient dévoilé ses irrégularités, il a dû les abandonner devant les preuves.
Le pédigrée complet de ce monsieur figure sur http://en.wikipedia.org/wiki/Andrew_Wakefield , appuyé sur plusieurs dizaines de documents.


Intervenant suivant : une pédiatre s’inquiétant de l’augmentation du nombre d’enfants souffrant de problèmes neurologiques. Quelle augmentation et due à quelle cause ? Pas un chiffre. Seul argument : « Demandez à n’importe quel instituteur, il vous dira que quelque chose a changé ». On n’est pas plus précis.

Séquence suivante : une séance présidée par le Président du Comité Gouvernemental de Réforme du Congrès des EU Dan Burton. Première remarque, celui-ci ne se conduit pas du tout comme un président de séance, mais comme un procureur. Le représentant de la FDA (Food and Drug Administration) déclare qu’on ne peut pas garantir pour chaque dose de vaccin contenant du Thimerosal qu’elle ne causera aucun tort (le président ne lui laisse pas placer la moindre explication). Le film présente cet élément comme un aveu de première importance. Cela me paraît absurde. Sur des dizaines de millions de doses injectées depuis 1929 (début de l’usage du Thimerosal), il se pourra toujours qu’il y en ait qui tombent sur un terrain particulier et causent du tort, ou qu’il y ait eu dans une livraison un problème, une défectuosité. On ne pourrait fabriquer aucun produit s’il fallait pour pouvoir le fabriquer garantir qu’il ne posera jamais aucun problème, mais un risque hypothétique n’est pas une raison pour ne pas produire un médicament qui sauvera des millions de vie ! Ce président, Dan Burton, fait ensuite une déclaration étonnante selon laquelle rien de ce qui peut être nocif ne doit être injecté dans le corps humain, à quelque dose que ce soit. Si l’on suit sa logique, on doit pratiquement supprimer la vaccination, puisqu’elle repose souvent sur l’injection de virus vivant – alors qu’il venait de reconnaître que la vaccination nous a donné une qualité de santé qu’aucune civilisation n’a connu - . Ce que le film ne nous dit pas, c’est que Dan Burton –pilier par ailleurs du mouvement contre l’interruption de grossesse et du mouvement pour le droit de posséder des armes - mène depuis longtemps une croisade à ce sujet, qu’il n’est donc absolument pas neutre (ce qu’on pouvait remarquer, pour le moins, à la façon dont il mène le débat), et que ses propos se sont heurtés à l’opposition du Center for Disease Control and Prevention, agence fédérale, et à celle de la Food and Drug Administration.

Question : pourquoi aucun, aucun des très nombreux arguments scientifiques allant à l’encontre des thèses du film ne sont-ils mentionnés ? Aucune étude, aucun spécialiste, aucun document ! Alors qu’il suffit de se baisser pour trouver mention d’études et d’articles scientifiques contredisant complètement les thèses avancées dans le film.

En voici deux parmi des dizaines :
http://www.soinsdenosenfants.cps.ca/immunisation/SecuriteVaccins.htm

http://www.cps.ca/Francais/enonces/ID/MIPCommentaire_Juin07.htm#VACCINS


On passe à un autre accusé, l’aluminium. Le malade dit simplement qu’il a reçu un vaccin fin 99 début 2000. « Fin de l’année 2000 je dormais mal et j’avais une sensibilité à la pression ». « Il y a eu ce fameux article sur la myophaciite à macrophages et le lien éventuel entre l’aluminium contenu dans les vaccins et le syndrome qu’on pouvait isoler ou retrouver par une biopsie». Interview du Pr. Gherardi, qui dit que les maladies neuro-musculaires sont rares mais très nombreuses (ce qui n’a rien à voir avec les effets des vaccins), et qu’il a trouvé des lésions contenant des traces d’aluminium demeurés dans un muscle longtemps après une injection.

Le Pr. Chérin explique qu’il y a probablement des personnes qui pour des raisons génétiques ou autres, sont prédisposées à ne pas éliminer suffisamment l’aluminium. Il s’agirait donc de cas exceptionnels, pas d’une conséquence fréquente de l’utilisation des adjuvants comportant de l’aluminium. Je lis ailleurs en effet que « Une étude du Dr Pelissier, sur 80 cas de MFM, montre que ' 56 % appartiennent à un groupe génétique particulier '. http://aluminiumetvaccins.e-monsite.com/rubrique,l-hydroxyde-d-aluminium,999144.html

J’ai trouvé des chiffres contradictoires, disant qu’en France, 130 ou 350 personnes souffrent de myophaciite à macrophages.
http://aluminiumetvaccins.e-monsite.com/rubrique,consequences-vaccins,1005300.html
L’Agence française de Sécurité sanitaire des Produits de Santé a publié depuis les résultats d’une autre étude, et s’est prononcée en 2004 à l’unanimité de son Conseil Scientifique, en reconnaissant qu’il y avait très probablement un lien entre l'administration de vaccins contenant un adjuvant aluminique et la réaction dite myophaciite à macrophages, mais que celle-ci n’est pas liée à un syndrome clinique spécifique – en d’autres termes, qu’il n’y a pas maladie. Il n’y a pas lieu pour lui de remettre en cause la balance bénéfice-risque des vaccins contenant un adjuvant aluminique.
http://www.esculape.com/generale/myofasciite-macrophages-afssaps2004.pdf
Le Comité consultatif mondial sur la sécurité des vaccins a ensuite conclu à son tour : « D’après les données les plus récentes, rien ne permet de conclure qu’il existe un risque sanitaire résultant de l’administration des vaccins aluminiques », et « Aucun argument solide, scientifique ou clinique, ne permet non plus de recommander un quelconque changement de la pratique vaccinale ». Je lis aussi que « L’avis donné par des experts indépendants au Ministère français de la Santé concernant les derniers résultats de l’étude concorde avec celui du GACVS » (Comité consultatif mondial sur la sécurité des vaccins). Pourquoi aucun écho de ces études ne figure-t-il dans le film, qui ne les mentionne même pas ?
De plus, le film présente l’étude du Pr. Gherardi dans le cadre d’un plaidoyer général contre la vaccination, alors que ce n’est absolument pas le propos de l’auteur.


Nous passons au Québec, avec l’interview d’un spécialiste qui explique le rôle des cellules microgliales, ce qui est intéressant et n’a rien à voir avec une nocivité de vaccins. Je comprends mal le rapport avec la suite. Mais évidemment, interviewer un scientifique dans un laboratoire donnera l’impression que les thèses du film ont une caution sérieuse.

On nous montre une petite fille née avec une microcéphalie (périmètre crânien plus petit que norme). Avant la vaccination, dit le père, elle avait un développement qu’on trouvait « relativement normal ». Pourquoi relativement ? Son développement n’était donc pas entièrement normal, ce qui nous rappelle le premier cas exposé dans le film. La mère dit elle-même que les fabricants du vaccin recommandent la prudence quand il s’agit de vacciner des enfants à problèmes neurologiques confirmés ou même sous-jacents, parce que ces enfants risquent alors de présenter des problèmes neurologiques beaucoup plus importants. Elle dit elle-même que c’était le cas de sa fille. On n’avait probablement pas à vacciner sa fille, c’est sans doute tout à fait exact, alors pourquoi l’a-t-on fait ? Le médecin responsable a probablement commis une grave erreur. On commet aussi parfois de graves erreurs au cours d’opérations, ce n’est pas une raison pour mettre le principe des opérations en cause.

Revoilà Mme Loe, du Centre National d’Information sur la Vaccination (USA), elle fait toujours l’impasse sur la baisse de la mortalité après la généralisation des vaccins.

C’est ensuite le tour du vaccin contre l’hépatite B. L’interviewé, représentant du REVAHB (gens qui s’estiment victimes du vaccin contre l’hépatite B), montre un graphique selon lequel des polyarthrites se sont fort répandues à partir de 94-95, période où l’on a probablement prescrit ce vaccin beaucoup trop largement, en tout cas selon l’avis d’un médecin interviewé (sans contradicteur). Mais ce même graphique montre … que le nombre de malades atteints a continué à augmenter quand le nombre de vaccins contre l’hépatite B administrés a baissé drastiquement. L’interviewé déclare lui-même qu’il faudrait vérifier si les personnes atteintes ont été vaccinées, donc on ne sait même pas cela. Comment peut-on dire qu’il y a un rapport ? Combien d’autres données sanitaires ont-elles varié depuis 1994-95 ?

Retour au Québec pour entendre un avocat dire qu’on demande trop d’études scientifiques pour établir un lien entre vaccin et pathologie. Pourquoi n’entend-on une fois de plus pas d’avis différent ? Ensuite on lit, sur un fond de musique dramatique, que les parents de Lauralie n’ont pas été indemnisés parce que le tribunal spécialisé n’a pas reconnu, en 2007, de lien entre le vaccin et la pathologie. Pourquoi ? Pas un mot d’un représentant du tribunal, pas une ligne des attendus du jugement. C’est un procédé professionnellement inadmissible : on passe de longues minutes à rendre une thèse sympathique au spectateur, on ne donne même pas la parole à un représentant d’une autre thèse, et on utilise un procédé quasi subliminal pour dramatiser la défaite de la première thése.
Concernant les adjuvants, de façon plus générale, « En 1976, une vaste campagne de vaccination aux Etats-Unis a concerné 45 millions de personnes. Elle a été rapidement arrêtée suite à plus de 5 000 cas de malades du syndrome de Guillain-Barré. Le vaccin a été accusé d’en être responsable.
Pourtant, il ne possédait pas d’adjuvants. Finalement, selon une analyse a posteriori, il y avait presque le même nombre de malades chez les non vaccinés. Dans le vaccin contre la grippe A en France, les adjuvants utilisés ne sont pas des inconnus. Le premier adjuvant, le MF59 a été utilisé dans les vaccins grippaux saisonniers et administrés à 40 millions de personnes sans effet secondaire grave notoire et sans syndrome de Guillain-Barré. Le second adjuvant a été utilisé dans le traitement du cancer du col de l’utérus ».
http://fr.news.yahoo.com/72/20090928/thl-grippe-a-faut-il-avoir-peur-des-adju-0779602.html
Je passe sur les détails du reste, le retour du Dr Geier, un extrait d’une rubrique de CNN où un médecin répondait à Mme Loe, ce qu’on a coupé dans le film, Mme Loe qu’on retrouve ensuite encore, toujours sans contradicteur, affirmant qu’il ne doit pas y avoir de droit plus grand que l’autodétermination pour soi-même et ses enfants. Donc si des témoins de Jéhovah refusent à leur enfant exsangue une transfusion de sang, il faut laisser mourir l’enfant ?
Mme. Kreft-Jais Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé : intervention ne plaidant ni pour une thèse ni l’autre
Retour de Mme Loe, bien sûr sans contradicteur : elle affirme que les vaccins ont des effets négatifs sur beaucoup plus de gens que ce que la Régie de la Santé a jamais estimé. Chiffres ? Sources ? Preuves ? Rien. Pour elle, il est immoral de considérer que le bien commun pèse plus lourd que des accidents. Combien de personnes a-t-on le droit de sacrifier, demande-t-elle ? 500 ? Elle ne semble pas se soucier de ce que dans le cas inverse, on sacrifie des millions.
Retour du président de Commission du Congrès, toujours aussi partial. Il parle du lobbying (indéniable) des compagnies pharmaceutiques ce qui, entre parenthèses, est amusant pour quelqu’un qui s’est battu pour entre autres l’impunité juridique des fabricants d’armes, lobby particulièrement actif, contre toute attaque juridique concernant les dangers provoqués par leurs produits. http://www.ontheissues.org/IN/Dan_Burton_Gun_Control.htm
Seule attitude plus équilibrée, celle du Pr. Gherardi qui défend qu’il faut à la fois développer la vaccination et le développement des recherches sur les risques. Son propos est noyé dans un plaidoyer anti-vaccination, alors qu’on lit pourtant dans l’introduction à son article sur la question : « Une estimation précise des risques liés aux adjuvants des vaccins, et notamment à la persistance chronique de l'hydroxyde d'aluminium dans le système immunitaire, est requise afin de préserver la confiance dans l'approche vaccinale au sein de la population et les bénéfices inestimables que cette approche (NB : la vaccination) procure en termes de santé publique à l'échelon mondial. »
http://www.em-consulte.com/article/104539

On attend en vain une explication de la thèse exacte du film, qui cultive le flou sans jamais préciser son propos : s’agit-il de parler des polémiques autour du RRO, du Thimérosal et de l’aluminium uniquement, ou d’en tirer des conclusions qui dépassent ces cas ? L’auteur colle des polémiques partielles l’une à l’autre d’une façon dont la conclusion sera bien sûr pour le spectateur que « Les vaccins, c’est dangereux ». Le titre « Silence, on vaccine » est d’ailleurs éloquent. De même, la première phrase du film crée la confusion en parlant de troubles présentés « après une vaccination classique », sans plus de précision.
Lina B. Moreco, l’auteur du film, donne une idée de son sérieux sur son blog en écrivant « Il y a quelques mois, la grippe pandémique H1N1 nous était annoncée comme dévastatrice. La mort nous attendait tous et chacun. ». Ce que je me demande, c’est comment France 5 peut coproduire et présenter comme un documentaire répondant aux critères professionnels de recherche d’impartialité un film produit par quelqu’un dont la partialité est aussi totalement affichée que celle de cette personne.
Présentation unilatérale, inébranlablement favorable, de thèses à l’encontre desquelles existent de multiples arguments étayés par des études scientifiques ; absence totale de précisions ; présentation sans contradiction d’affirmations graves avancées sans ombre de preuve ; déformation et dissimulation de faits ; présentation comme autorités de personnes à l’évidence très douteuses (je ne parle pas ici des Drs. Gherardi et Chérin) ; manipulation de l’image et du son : j’aurais reçu d’un étudiant un travail semblable, non seulement je l’aurais busé, mais j’aurais nourri les plus grandes inquiétudes sur le tort qu’il allait occasionner s’il accédait à la profession. J’ignore quelles sont les qualifications de Mme. Moreco, mais du tort, ici, elle en occasionne, et grave.
Epinglons quelques réactions au Québec, d’où provient le film.
Le Devoir, principal quotidien francophone du Canada, passe en revue toutes les affirmations du film et leur fausseté (http://www.ledevoir.com/societe/sante/232179/silence-on-vaccine-la-vaccination-peut-elle-etre-dangereuse ). Une série de spécialistes, docteurs de l'hopital pour enfant Ste Justine à Montréal, écrivent : "D’un point de vue médical, le film propose une vision mensongère et dangereuse de la vaccination. Ce documentaire malhonnête, clairement antivaccinal, ne repose sur aucune réalité scientifique (...) Il faut rejeter collectivement la sempiternelle théorie du complot regroupant tous les acteurs des systèmes académique, scientifique et économique.
Cessons de semer la peur et la confusion quant à la vaccination de nos enfants. Et nous limiterons ainsi le nombre de victimes." (http://www.sciencepresse.qc.ca/blogue/2011/07/06/retour-force-rougeole-quebec ).
Commentaire du docteur Horacio Arruda, directeur de la Protection de la santé publique au ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec : « Ce qui est dit dans ce film-là, ce sont des hypothèses soulevées depuis plus de dix ans et depuis, il y a plus d'une vingtaine d'études épidémiologiques avec beaucoup de patients dans plusieurs pays qui ont complètement éliminé ces hypothèses » (source Radio-Canada).
Ajoutons les questions que l’on peut se poser à propos de France 5, chaîne que son cahier des charges consacre «à la diffusion et au partage des connaissances », qui a coproduit le film, et l’a déjà diffusé trois fois, sans aucune contradiction. Les 79 (en ce moment) commentaires sur la page du film montrent l’impact du film sur des personnes pour lesquelles il n’y a pas de doute, le vaccin est un meurtrier.
Tom Goldschmidt
38 ans journaliste à la RTBF.
Professeur à l’IHECS.
Aujourd’hui pré-retraité.
PS : Connaissant la fabuleuse capacité des mouvements conspirationnistes et autres à inonder les commentaires des publications qui leur déplaisent, je désactive, à titre exceptionnel, les commentaires pour cette publication. Les thèses des mouvements anti-vaccins s'étalent à coups de copier-coller sur de nombreux sites, il n'est pas difficile de les trouver.

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