Voter PTB-Go ?

Faut-il voter PTB-Go ? Pour beaucoup - et j'en suis - la réponse à la question (différente) "Voter PTB ?" a été longtemps "Non, à aucun prix".

Suite de l'article :
Le PTB provient en effet d'une mouvance mao-stalinienne qui l'a amené jadis à soutenir les pires idéologies et les pires crimes, de Staline à Pol Pot en passant par la Révolution Culturelle. Et mieux vaut vivre dans une société capitaliste que dans une société où les divergences politiques sont réglées d'une balle dans la nuque (bien sûr, l'un n'empêche pas nécessairement l'autre).  Aujourd'hui, seul réel survivant de la gauche radicale belge, le PTB se présente comme fer de lance d'une dynamique unitaire, PTB-Go ("Go" : Gauche d'Ouverture). Sa manifestation pour un plan d'urgence sociale (photos) a connu un réel succès, même si annoncer 2.500 présents relève d'un certain optimisme. PTB-Go, une manoeuvre pour tirer les marrons du feu ? Pour que le PTB baîllonne ses alliés actuels s'il accède au pouvoir ? Ce sont les craintes que certains expriment à gauche du PS. A juste titre ? Mais alors, voter pour qui, si l'on refuse de donner sa voix aux partis traditionnels ? Pour VEGA, un micro-mouvement tout neuf ? Pour le groupusculaire Parti Socialiste de Lutte allié au fantômatique Parti Humaniste ?
Tentons de voir ce genre de questions en tenant compte de la dynamique qui les traverse. Je hais cordialement la matrice idéologique dont sort le PTB. J'ai connu le temps où trois petits groupes se disputaient en Belgique l'étiquette de "marxiste-léniniste" (lisez "mao-stalinien pur et dur) : Amada-TPO (Alle Macht Aan De Arbeiders - Tout Le Pouvoir Aux Ouvriers), UC(ML)B (Union des Comunistes (Marxistes-Léninistes) de Belgique) et Lutte Communiste. On peut difficilement se représenter aujourd'hui le délire dans lequel flottaient ces formations. Les chenus dans mon genre se rappellent peut-être le "procès populaire" public intenté par l'UC(ML)B à deux de ses cadres accusés de "complot néo-révisionniste international", l'un de ces cadres étant physiquement détenu par ses ex-camarades. Leurs partisans ripostèrent en accusant leur Comité Central en ces termes : "Le CC organise la terreur social-fasciste dans l'UC(ML)B". Ambiance et cotillons...

The Survivor...

Bref, le survivant fut Amada-TPO. C'était aussi le plus hystériquement pro-chinois. Et la Chine était à l'époque en conflit aigu avec l'URSS, donc Amada-TPO subordonnait tout à l'analyse suivante : l'impérialisme du Kremlin est le plus

 dangereux, il faut donc avant tout lutter contre l'URSS et le PC, quitte à soutenir un jour non seulement la Chine mais les USA contre l'URSS qui va envahir l'Europe. A part ça, ce mouvement avait une autre bête noire, la pire de toutes : le trotskisme, pratiquement assimilé au fascisme, en plus dangereux.
Si Amada-TPO survécut, ce fut parce qu'il était enraciné, malgré ses délires, dans la réalité : beaucoup de militants s'étaient implantés en usine, ce dont ils retiraient un certain réalisme, par exemple que détruire les syndicats existants n'était peut-être pas une très bonne idée.
De plus, les maisons médicales et les boutiques de droit créées par l'organisation assuraient non seulement une assise populaire mais un feedback de ce qui vivait chez les travailleurs.
Amada-TPO devint le PTB en 1979. Le maître restait le président, Ludo Martens, dont Paul Goosens note : "Son pouvoir dans l’organisation échappait à toute critique. (...) en dépit de l’exode des militants et des scores électoraux affligeants, Martens a réussi à se maintenir. Le respect pour son engagement, son détachement et sa capacité de conviction était tellement grand que l’on faisait mine de ne pas voir ses erreurs d’appréciation".
( http://politique.eu.org/spip.php?article2011 ).

Oui mais... Ludo Martens perdit la présidence en 2008, et mourut en 2011. Le VIIIè Congrès fut celui d'une modification qui n'est pas seulement cosmétique. Ainsi, Cuba, jadis voué aux gémonies, est aujourd'hui soutenu. Contrairement à ce qu'on lit parfois, le PTB ne soutient pas vraiment le régime de Corée du Nord. Voir http://parlemento.wordpress.com/2011/01/26/hedebouw-le-ptb-soutient-la-coree-du-nord-et-du-sud/ . Sur l'Ukraine, le PTB interviewe longuement Jean-Marie Chauvier, anti-stalinien de très longue date et soutien de la dissidence.
http://www.solidaire.org/index.php?id=1340&L=1&tx_ttnews[tt_news]=37923&cHash=ba525865b66d980fd23c7fbca314541c
(Cet article me paraît autrement intéressant que les délires médiatiques qualifiant, avec des tremolos, de "révolution", mot soudain sympathique, une victoire bien plus militaire que politique obtenue grâce à la pourriture interne du régime - les Berkouts n'avaient aucune envie de mourir pour Ianoukovitch - ).

Anciens et Nouveaux.

Mais une partie des cadres du PTB est évidemment sortie de l'ancien moule. S'imaginer qu'en l'espace d'un Congrès cette réalité allait miraculeusement disparaître, c'est du conte de fées, pas de la politique. Le parti doit être encore aujourd'hui le théâtre d' une sacrée lutte interne entre Anciens et Nouveaux. La différence entre le programme du PTB à ses débuts, qu'on pouvait résumer à "Construire le Parti révolutionnaire", et son programme actuel, de réformes, doit suffire à faire vomir les mânes des fondateurs dans leur paradis rouge. Ne demandons pas l'impossible.
Je n'ai aucune assurance que les Nouveaux ont gagné ou vont gagner définitivement. Ni que, même dans ce cas, le PTB serait un parti selon mon coeur. Mais la question n'est pas aujourd'hui de voter ou non PTB, MAIS bien de voter PTB-GO. En d'autres termes, le PTB fait cause commune avec des gens auxquels du temps de Ludo Martens, il aurait promis le cachot : non seulement son appel est partagé par l'ex-sénateur Ecolo Josy Dubié, la députée bruxelloise PS Sfia Bouarfa, le journaliste Hugues Lepaige, aujourd'hui directeur de la revue Politique, Christian Viroux - ex-secrétaire régional FGTB Centrale Générale Charleroi - et d'autres indépendants encore...

 Mais qui plus est, chose presque incroyable pour les vieux de la vieille, le PTB marche main dans la main avec des membres du PC, et pire encore, avec des trotskistes ! Ces gens dont Staline disait "Fusillez ces chiens enragés !". Voyez l'appel publié sur http://ptb.be/go .
Pour la première fois, cette chimère, une dynamique unitaire à la gauche du PS, semble avoir une chance de vivre. Evidemment, si on la refuse au nom de l'histoire du PTB, elle ne vivra pas. Et nous continuerons à donner nos voix à des partis qui votent la chasse aux chômeurs, la domination des banques, le "dégraissage" des services publics, et l'austérité européenne. Voter PTB-Go, ce n'est pas, comme le dit la direction du PS, "diviser la gauche", c'est plutôt renforcer les voix de gauche au sein de ce parti où elles ont bien de la peine à se faire entendre.
Alors, est-ce l'heure de se demander ce que ferait le PTB s'il avait la majorité absolue, alors qu'on est loin d'être sûr que PTB-GO aura un député ???
 
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