vendredi 12 mars 2010

Elisabeth Badinter En Remet Une Couche. Jetable. (Vidéo)


Elisabeth Badinter n'a jamais eu peur de secouer le cocotier. Jadis, ses thèses sur la convergence des sexes l'avaient amenée à rêver du jour, qu'elle voyait relativement proche, où la science permettrait aux hommes de porter des enfants. Elle est la seule personne qui m'ait demandé (j'avais eu le plaisir de l'interviewer à l'époque) quel effet cela me faisait de m'imaginer enceint. Peut-être l'avais-je déçue en répondant que cela ne m'en faisait aucun, vu que la question se situait pour moi hors du champ du possible. C'était l'époque du livre "L'Un Est L'Autre", paru en 1986, auquel j'avait largement préféré ensuite "XY, de l'identité masculine".

Elisabeth Badinter s'est brouillée avec une partie du mouvement féministe, en publiant "Fausse route : Réflexions sur 30 années de féminisme" (2003). Elle prenait ses distances avec une vision qui selon elle figeait les femmes dans un rôle de perpétuelles victimes. « À vouloir ignorer systématiquement la violence et le pouvoir des femmes, à les proclamer constamment opprimées, donc innocentes, on trace en creux le portrait d'une humanité coupée en deux peu conforme à la vérité. D'un côté, les victimes de l'oppression masculine, de l'autre, les bourreaux tout-puissants ». Ces propos lui avaient valu de copieuses volées de bois vert, par exemple de la québecoise Elaine Audret, qui écrivit :"La méthode d’ "analyse" d’É. Badinter est simple, efficace et malhonnête."

"Le conflit, la femme et la mère", qui vient de paraître, a lui aussi fâché, mais les coups viennent plutôt d'autres milieux. La députée UMP Edwige Antier, pédiatre, traite l'auteur d'"archéo-féministe", qui ignorerait que "l’éducation d’un enfant est une grande source d’épanouissement pour un adulte. La femme d’aujourd’hui revendique, avec sa nouvelle liberté, le droit d’élever son enfant comme une vraie personne." La députée glisse sur le fait que, dans son propos comme dans la société, ce rôle - et le retour au foyer - reste assumé par les femmes. En tout cas, si certains estiment que E. Badinter n'est plus féministe, la marée de haine qui accueille ses propos actuels sur certains sites est certifiée "beauf machiste 100%".

Elisabeth Badinter a défendu son dernier livre sur les ondes de - entre autres - France Inter. Son discours ici sur l'allaitement et ses enjeux cachés est plus qu'intéressant, son couplet en défense des couches (pour bébés) jetables (actuellement non dégradables) semble poser question (la libération que ces couches a apporté aux femmes est-elle plus importante que le respect de l'environnement ?), mais l'auteur - qui l'a précisé ailleurs - ne souhaite pas qu'on se fiche de l'environnement, simplement que l'on s'empresse de créer des couches biodégradables. En tout cas, c'est certainement utile qu'une voix mette en lumière les progrès d'une "régression douce" dans la condition féminine.


Journée spéciale Elisabeth Badinder - France Inter
envoyé par franceinter. - Regardez les dernières vidéos d'actu.

Cliquez ici pour recevoir chaque mois une liste des nouveaux articles de ce blog. Vous pouvez être prévenu/e de chaque parution en cliquant "Messages (Atom)" tout en bas de la page d'accueil.


Mots-clef : femmes, maternité, féminisme, emploi, couches, Badinter, Elisabeth, conflit

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Je ne nie pas que certains détracteurs de Badinter soient des machistes invétérés, mais vous omettez de signaler les critiques formulées à son encontre par de véritables féministes, qui pointent par exemple son désintérêt pour la dimension sociale (je veux dire de classe) des discriminations à l'encontre des femmes ou, au contraire, sa focalisation excessive sur l'islam.

C'est elle qui déclarait en 2003 : "Franchement, depuis longtemps, dans la société française de souche, que ce soit le judaïsme ou le catholicisme, on ne peut pas dire qu'il y ait une oppression des femmes". (cité par Thomas Lancelot, "Elisabeth fait fausse route", Le Monde, 11 mars 2010).

De mon point de vue, une telle ânerie aux relents xénophobes suffit à décrédibiliser son auteur.

J'ajouterais que récemment encore, je l'entendais appeler à poursuivre l'effort de guerre de l'OTAN en Afghanistan afin "libérer les femmes afghanes".

En résumé, Badinter incarne selon moi les pires dérives du féminisme bourgeois (elle est présidente du CA de Publicis Group) du début du XXIe siècle.

Tom Goldschmidt a dit…

Il me semble que non seulement je n'omets pas ces critiques, mais je place un lien vers un article critique. Cela dit, j'ai voulu signaler un propos intéressant, pas faire un historique complet des nombreuses polémiques qui entourent l'oeuvre de cette auteure.
Cela dit, s'il faut condamner quelqu'un non pour ses propos, mais parce qu'il/elle dirige un conseil d'administration ou équivalent, les écrits de Friedrich Engels sont bons pour la poubelle de l'histoire...

Martine a dit…

Beaucoup de féministes se sont distencées d'Elizabeth Badinter. Or peu d'entre elles on tenu des discours aussi justes et objectifs à propos de la condition féminine.
Intimement convaincue et impliquée dans l'évolution de la l'émancipation des femmes et par ces temps qui visent à son net recul, de même qu'au retour à des valeurs archaïques tendant à remettre la femme à sa place..soit "à la maison", on ne peut qu'encourager et souhaiter que Madame Badinter poursuive son oeuvre.