jeudi 4 février 2010

La "Chasse Aux Chômeurs" Continue...



On savait que les exclusions du chômage ont des conséquences humaines dramatiques. On sait moins que cette pratique a un coût qui aggrave la situation financière des CPAS. La Fédération des CPAS de l'Union des Villes et Communes de Wallonie s'est réunie le 22 janvier en assemblée générale. Elle a montré les dents en direction de l'ONEM. Celui-ci imposerait des charges supplémentaires très lourdes aux Centres Publics d'Aide Sociale : le surcoût se situerait aux alentours de 20 millions d'euros - contre 18 en 2008 -. En effet, logiquement, un chômeur qui perd ses allocations se tourne vers le CPAS le plus proche pour subsister. Claude Emonts, président de la Fédération, déclare : "Ce qui se passe maintenant, c'est un plan d'exclusion, pas d'accompagnement. Pour nous, c'est inacceptable". La FGTB wallonne relève que "Fin 2008,en Wallonie 38% des cas pris en charge par les CPAS (paiement du revenu d intégration) étaient des personnes exclues par le plan de contrôle".

La Suite de l'Article
ONEM et FOREM publient des estimations positives des résultats de leur "Activation du Comportement de Recherche d’emploi (ACR)" : avant tout, des entretiens individuels périodiques durant lesquels un facilitateur évalue les activités de recherche d’emploi des chômeurs indemnisés, avec une série de mesures d'accompagnement (dispositifs d'insertion professionnelles, cellules de reconversion, transmission individualisée des offres d’emploi...) . L'ACR vise "les personnes âgées de moins de 50 ans qui réunissent simultanément les conditions suivantes : chômeur complet indemnisé inscrit obligatoirement comme demandeur d’emploi, au chômage depuis 15 mois ou 21 mois au moins, ne se trouvant plus dans la première période d’indemnisation, apte au travail et ne pouvant bénéficier d’une suspension de la procédure de suivi" (par exemple, parce qu'elle suit une formation).
Les sanctions encourues sont une suspension des allocations, allant de quatre semaines à un an, ou une radiation définitive. Pour échapper à pareille sanction, on a intérêt à accepter le premier emploi qui vous tombe sous la dent ... ce qui devient finalement, reproche-t-on à l'ONEM, une promotion des emplois précaires !

Ce n'est pas la seule critique adressée au Plan. On lui impute une inflation des exclusions : 4.523 exclusions définitives ont été prononcées en 2008, contre 2.562 en 2007; soit + 76 %. 6.425 suspensions des allocations de quatre mois ont été prononcées en 2008, contre 4.896 en 2007; soit + 31%. Le ministre wallon de l’Economie, Jean-Claude Marcourt, estime qu'en pratique l'ONEM ne tient pas compte de certains efforts de formation et sanctionne des chômeurs injustement.
La "Plate-forme contre le plan de chasse aux chômeurs et pour la création d’emplois de qualité" passe en revue les défauts du Plan, considère qu'il sanctionne des personnes qui cherchent activement un emploi, pénalise les chômeurs les moins formés, les plus fragiles socio-culturellement, et en réclame le retrait.
Cette exigence a été relayée par de beaucoup plus grosses voix. Lors de la toute récente manifestation pour l'emploi qui a réuni quelque 30.000 personnes à Bruxelles, tous les syndicats ont demandé une suspension de l'ACR. "Tribune", l'organe de la CGSP, écrit en décembre 2009 : "Signe de l’aggravation récente de la situation, le nombre de demandeurs d’emploi depuis moins d’un an a explosé : le nombre des inoccupés depuis moins de 6 mois a augmenté de 9,2 % tandis que celui des inoccupés depuis plus de 6 mois et moins d’un an a grimpé de 23,4 % ! Dans le même temps, le nombre d’offres d’emploi gérées par le Forem a diminué de 20 % ! En pareilles circonstances,décrocher un job est une entreprise encore plus difficile et le plus souvent vouée à l’échec. Dans ces conditions, le contrôle de la disponibilité apparaît comme une aberration. Fin 2008, les chiffres révélaient un constat dramatique : au cours de l’année, 65000 personnes avaient subi des sanctions d’exclusion ou de suspension de leurs allocations de chômage.

Retrait, non. Révision, peut-être, mais ...

Un retrait, il n'en est pas question pour le président du PS. Il critique pourtant le plan : « Une exclusion qui se produit dans une sous-région où il n’y a pas d’emploi est injuste et doit cesser. », a-t-il déclaré ce lundi 1er février. Mais pas question pour Elio di Rupo d'un moratoire qui reviendrait à "donner l’impression que, demain, on rase gratis. ».
Bref, suspension, non, révision oui... En fait, peut-être : car, rappelle Joëlle Milquet, un projet en ce sens existe depuis 2008. Mais, dit le cabinet de la Ministre de l'Emploi, " il est bloqué depuis 2008 par le gouvernement flamand. Ce projet prévoit notamment une beaucoup plus grande personnalisation de l’accompagnement. Il prévoit aussi des mesures pour les personnes éloignées du marché du travail. » . Oui, répondent
certains, il prévoit aussi une accentuation de la répression : "suspendre le paiement des allocations dès la première absence injustifiée à une convocation ».
Bref, la suspension du plan d'accompagnement risque fort de faire naufrage sur le refus du PS. Avec quelles conséquences pour les chômeurs, et pour les CPAS ? Et quelle réaction de la FGTB wallonne, qui a fait de ce dossier l'une de ses priorités absolues ?
PS : Au lendemain de la publication de cet article, je lis dans la Libre : "Écolo a d'ailleurs quelques recettes, comme investir dans les métiers verts. Écolo plaide pour l'arrêt du plan d'exclusion du chômage. «C'est le mythe de la sanction," tranche la députée Muriel Gerkens. "Toutes les études montrent que les exclus du chômage ne s'insèrent plus du tout sur le marché du travail après. On a l'impression d'une machine à démoraliser, à briser. » Pour Muriel Gerkens, les moyens consacrés au contrôle de la disponibilité des chômeurs doivent être réorientés vers la formation. Mais quel poids peut avoir pareille prise de position d'un parti absent du gouvernement fédéral ?




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Mots-clef : cpas, chômage, radiation, exclusion, emploi

1 commentaire:

Echocynique a dit…

Une personne qui ne cherche plus d'emploi n'est plus "demandeur d'emploi" et donc ne doit plus recevoir d'allocation.

Simple, non?